Qu’est-ce qu’une épice ? La définition est ambiguë. Les herbes aromatiques font-elles partie du club ? Toutes deux appartiennent à la grande famille des PPAM : plantes à parfum, aromatiques et médicinales. Cependant, les ingénieurs agronomes désignent comme épices des PPAM dépourvues de chlorophylle (graines, écorce, bulbe, racine, gousse, fleur…) et provenant généralement de pays tropicaux. L’expression herbes aromatiques s’applique aux plantes dont on emploie la partie herbacée à l’état frais ou séché (et majoritairement présentes sur le pourtour du bassin méditerranéen). De ce point de vue, certaines plantes comme la coriandre peuvent appartenir aux deux catégories : herbe aromatique pour ses feuilles et épice pour ses graines. Les écoles de cuisine ne se satisfont cependant pas de ce tableau sur deux colonnes, trop réducteur. Les formateurs préfèrent s’appuyer sur une classification basée sur les caractéristiques organoleptiques : composés volatiles (odeur), composés sapides (saveur) et pigments (couleur). La chimie flirte ici avec la gastronomie. L’avantage d’une telle classification est d’offrir un panel de familles dont les membres sont interchangeables quasiment sans risque d’incompatibilité d’humeur.

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Les épices chaudes

Les notes douces, chaudes et sucrées de la vanille, de la cannelle, du cumin, du carvi, de la fève tonka et de la noix de muscade les y apparentent. À l’écart des autres épices, elles lévitent dans une bulle aux parfums d’enfance.

Usage traditionnel : dans les desserts, les couscous et les tagines.

On retrouve souvent la cannelle aux côtés de la pomme. La noix de muscade, plus difficile à marier, se plaît dans les préparations à base d’œufs ou de lait. Autres rôles possibles : essayez l’association avec le chocolat et les crustacés, glissez-en dans les tartes et les confitures. L’odeur d’amande de la fève tonka sublime une simple purée de pommes de terre ou un plat de légumes vapeur.

Fèves tonka
Fèves tonka Photo : Valérie Lhomme
Graines de cumin
Graines de cumin Photo : Valérie Lhomme

Les épices fraîches

La cardamome, la réglisse, la badiane (anis étoilé), le sumac, les graines de coriandre et les graines de fenouil dégagent un arôme frais et raffiné, avec un goût légèrement sucré.

Usage traditionnel : dans les desserts, les infusions ou le thé. 

Autres rôles possibles: avec les viandes rôties (poulet, porc, veau…) ou dans une sauce crémeuse. Le goût camphré de la cardamome réveille aussi un plat de poisson, comme les graines de coriandre qui évoquent le zeste d’orange et la sauge. Bon à savoir : le sumac, à la saveur citronnée, est interchangeable avec le thym.

Cardamome verte
Cardamome verte Photo : Valérie Lhomme

Les épices colorantes

Fascinantes, les épices pigmentées donne une dimension spectaculaire à une préparation. Le safran, emblématique, décroche le tiercé gagnant : odeur, saveur et couleur. Le curcuma a peu de goût mais il présente l’avantage d’ensoleiller les plats (riz, soupes de poissons, tomates…) à peu de frais. Le paprika fait de même, avec une touche rouge et piquante en sus. Le roucou est utilisé comme colorant alimentaire pour teindre des fromages (mimolette, cheddar), des biscuits (Chamonix de LU) ou des filets de haddock.

Usage traditionnel : avec les poissons, les volailles, les sauces crémeuses.

Autres possibilités : dans les desserts, par petites touches, pour une panna cotta par exemple.

Curcuma
Curcuma Photo : Valérie Lhomme

Les épices piquantes et brûlantes

Ce groupe rassemble les poivres et faux poivres, les piments, la maniguette (ou graine de paradis), le wasabi et le gingembre frais. Ce dernier est par ailleurs interchangeable avec l’ail. Partout où vous mettez de l’ail, vous pouvez glisser du gingembre, cela fonctionne à tous les coups.

Usage traditionnel : pour relever des plats de volaille, poisson ou fruits de mer, le foie gras, mais aussi le chocolat ou les fraises.

Les épices phénoliques

Ce club ultra-sélect compte deux membres : le clou de girofle et le piment de la Jamaïque. Leur dénominateur commun? Une odeur très particulière dite « phénolique », médicamenteuse, à la limite de l’anesthésiant. Ces épices qui s’utilisent évidemment à des doses quasi homéopathiques, apportent du relief à des mets suaves ou sucrés.

Usage traditionnel : dans les chutneys, currys et bouillons. 

Autres rôles possibles: avec des poissons et des fruits de mer ou dans des compotes de fruits.

Clous de girofle
Clous de girofle Photo : Valérie Lhomme
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(Article publié dans le magazine Saveurs n° 214, 2014)

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