En passe de devenir très tendance, ce sirop rouge brun est le petit secret des cuisiniers inspirés par l’Orient méditerranéen. « La mélasse de grenade possède une saveur à la fois acide et sucrée. Chez nous, à Chypre, explique Andréas Mavrommatis, chef étoilé installé à Paris, on s’en sert aussi bien pour relever un plat de lentilles qu’une salade de fruits. » Une habitude qui le ramène à ses souvenirs d’enfance, quand il allait avec sa grand-mère cueillir les fruits qui venaient d’éclater. « Ensuite, il fallait l’aider à dépiauter les graines avant d’en extraire le jus. »

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Exotique chez nous (certes, on connaît bien le sirop de grenadine, mais il ne contient en général que des fruits rouges…), la grenade est un fruit très répandu tout autour de la Méditerranée. Quelques graines fraîches ajoutées au dernier moment changent la saveur d’un houmous. Une purée d’aubergines à la terrasse d’un café d’Istanbul s’en trouve rehaussée. Quant aux Arméniens, ils en parsèment leurs poivrons grillés. Originaire de Perse, ce fruit se révèle être le dénominateur commun d’un certain art de vivre.

Un exhausteur naturel de goût

Hélas, sa saison ne dure que le temps d’un automne. Aussi la mélasse a été inventée pour prolonger ce plaisir. Il s’agit d’une réduction par chauffage du jus obtenu en pressant les grenades. On peut aider la prise en ajoutant du sucre et du jus de citron. La préparation continue d’être un rituel familial à la campagne, tandis que les urbains, de l’Iran à l’Espagne en passant par la Grèce, la trouvent toute prête sur les étals des marchés. Chez nous, la mélasse de grenade s’achète dans les épiceries orientales. « On l’utilise un peu comme le vinaigre balsamique, poursuit Andréas Mavrommatis. Elle se rapproche de la mélasse de caroube, très employée dans la cuisine grecque. » Dans le monde ottoman, elle s’inscrit dans la famille des pekmez, ces sirops obtenus à partir de moût de raisin, de datte ou de mûre. Pour décliner en finesse les mille nuances qui vont du vif au sucré.

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(Article publié dans le magazine Saveurs n° 260, 2019)

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