Comment colorer naturellement ses plats ?
Boostée par la tendance du cake design, la cuisine revendique le droit à la couleur. Pourquoi pas, mais avec des colorants naturellement présents dans votre garde-manger. Découvrez comment obtenir toute la palette de l'arc-en-ciel sans produits artificiels ou de synthèse.
Bleu
Pour obtenir un bleu lagon, le premier réflexe est d’appeler le curaçao à la rescousse. Cette liqueur à l’orange donne des résultats spectaculaires mais se révèle peu adaptée à un goûter d’enfants. La parade ? Les Schtroumpfs. Il suffit de faire fondre ces bonbons gélifiés au micro-ondes avec un peu d’eau pour obtenir un nappage translucide façon « piscine ». Du sirop de menthe bleu produira un effet très proche. Le bleu de méthylène est une alternative. Insapide et inoffensif, il est vendu en pharmacie sous forme de poudre. Son pouvoir colorant est spectaculaire, y compris dans les urines ! Pour obtenir un bleu jean, misez sur la spiruline (algue séchée). Mélangez 1 c. à soupe de paillettes de spiruline avec 5 c. à soupe d’eau puis filtrez la solution à travers un filtre à café en papier (une passoire métallique ou un mouchoir en papier ne donneront pas le même résultat).
Vert
Souhaitez-vous un vert sapin, sombre et profond ? Optez pour les épinards. Mixez-les très finement avec un peu d’eau. Filtrez le jus en le pressant à travers une étamine et chauffez-le sans le faire bouillir (70 °C). À la surface se forme une écume gélatineuse, à recueillir avec une écumoire et à utiliser comme colorant. Cette technique peut s’appliquer à d’autres légumes verts ou plantes aromatiques riches en chlorophylle (cresson, menthe…). Pour un vert gazon lumineux, pensez au matcha (poudre de thé vert), à condition que sa saveur herbacée s’harmonise avec les ingrédients de la recette. Les algues comme la spiruline et l’afa, vendues en poudre dans les magasins bio, donnent une coloration d’un vert bleuté. Pour un vert pastel, la pâte ou la poudre de pistaches sont plus appropriées.
Rouge
Un rouge franc est difficile à obtenir. Côté salé, le concentré de tomates et le poivron rouge sauvent la mise. Côté sucré, on ne peut guère compter sur les fruits rouges qui, une fois mixés, virent au rose girly. La poudre d’urucum (ou rocou), riche en caroténoïdes, apporte un rouge éclatant. Les peuples autochtones d'Amérique du Nord s’en enduisaient la peau pour se protéger du soleil, d’où leur surnom de « Peaux-Rouges ». Une boisson (smoothie, cocktail) peut passer au rouge grâce aux fleurs séchées d’hibiscus. Une fois infusées, celles-ci donnent une boisson pourpre nommée « bissap » en Afrique ou « karkadé » en Égypte.
Rose
C’est la coloration la plus facile à obtenir, en premier lieu grâce à la betterave. Son jus de cuisson apporte un rose pastel ; sa chair mixée donne une teinte fuchsia. Grâce à son goût naturellement sucré, la betterave peut s’inviter dans les plats salés ou sucrés. Du jus de chou rouge additionné de jus de citron produit aussi un rose vif. Les fruits rouges confèrent, selon leur nature, un rose plus ou moins soutenu. À défaut de fruits frais, un sirop (grenadine, fraise, framboise, rose) assure l’intérim. Les feuilles d’arroche (plante aux feuilles pourpres), infusées telles quelles dans du lait ou de la crème, colorent le liquide en rose pivoine.
Violet
Les baies de myrtille, de mûre et de cassis teintent, selon le dosage, en mauve ou en violet, de même qu’un sirop de violette ou de lavande. Du chou rouge cuit et finement mixé donnera une teinte lilas à une préparation salée.
Jaune
Pour ensoleiller vos plats, puisez dans les épices. La poudre de curcuma possède un pouvoir colorant intense et particulièrement lumineux. Le curry est d’un jaune moins vif, tirant sur l’ocre. Plus inattendus sont les grains de pollen (vendus en magasins bio). Ils se conservent pendant des mois au congélateur et, prélevés à petites doses, donnent une teinte jonquille aux préparations lactées (crèmes, yaourts, milk-shakes…).
Orange
Le jus de carotte et la poudre de paprika apportent bonne mine aux cakes et autres plats salés. Le jaune du safran, tirant nettement sur l’orangé, trouve ici sa place. La poudre d’urucum (= roucou), plus ou moins diluée dans un liquide, produit un orange saumoné ou vif.
Noir
L’encre de seiche (à commander chez le poissonnier) teinte en gris foncé le riz, les pâtes et les sauces. L’ajout de quelques cuillerées de tapenade noire peut en accentuer le côté obscur. Côté desserts, la pâte de sésame noir assure à merveille sa mission. Pensez enfin au charbon végétal en poudre (complément alimentaire) dont le goût neutre s’adapte à toutes les recettes. Le contenu d’une gélule suffit à teinter, par exemple, 10 g de pâte d’amande.
Marron
Pour jouer sur la gamme allant du beige au marron, faites appel au caramel, au concentré de café, à la chicorée liquide ou au thé fortement infusé.
(Article publié dans le magazine Saveurs n° 240, 2017)